samedi 17 septembre 2011

Les climatologues redoutent le retour de la Niña

Lu sur le site du Monde

La Niña serait-elle, déjà, de retour ? Le Centre de prévision climatique (CPC) de l'administration pour l'atmosphère et l'océan (NOAA) a annoncé, jeudi 8 septembre, qu'elle était à l'oeuvre dans le Pacifique tropical. L'hiver qui s'annonce pourrait donc être marqué par un dérèglement météorologique analogue à celui qui a sévi depuis huit mois autour du globe. Inondations ici, sécheresse là, fortes précipitations neigeuses ailleurs ou encore tempêtes tropicales sur l'Atlantique pourraient être plus probables l'automne et l'hiver prochains.

Lire l'article sur le site de la NOAA : ici




Dans son communiqué, la NOAA dit prévoir "un renforcement progressif du phénomène qui va se pousuivre au cours de l'hiver". La prévision américaine est cependant jugée un peu trop audacieuse par certains. "Le modèle de Météo France prévoit une Niña d'intensité plutôt faible, mais le maintien de conditions neutres n'est pas exclu", tempère ainsi Jean-Pierre Céron, directeur scientifique adjoint de la recherche à Météo France. Sur 17 modèles dynamiques, seul celui utilisé par la NOAA donne jusqu'à présent une franche Niña, les autres hésitent entre des conditions neutres et une Niña très modérée.
Généralement, La Niña - caractérisée par une accumulation d'eaux froides sur le Pacifique tropical, au large de l'Amérique du Sud - revient tous les trois à sept ans, en alternance avec son antagoniste chaud, El Niño. La dernière Niña était apparue en juillet 2010 et a duré presque une année, ne disparaissant pas avant le mois de mai. Elle a été, en outre, le plus intense phénomène du genre observé depuis un demi-siècle. Avec des effets de grande magnitude, un peu partout sur la planète.
S'il se confirme, le retour de La Niña n'aura donc laissé qu'un répit très court - guère plus de trois mois - entre deux épisodes consécutifs. Ce retour "signifie que la sécheresse va probablement se poursuivre dans les Etats américains déjà touchés du Texas, de l'Oklahoma et du Nouveau-Mexique", a déclaré dans un communiqué Mike Halpert, directeur adjoint du Centre de prévision climatique de la NOAA.
Le fort déficit pluviométrique sur ces régions américaines a favorisé tout au long de l'année l'assèchement des sols superficiels ; c'est l'une des causes principales des incendies qui ravagent actuellement le Texas, les plus importants jamais enregistrés, selon les autorités locales. Dans la Corne de l'Afrique, où sévit une grave famine, les conditions très sèches déjà observées pourraient se prolonger au cours des prochains mois.
La Niña favorise au contraire des conditions plus humides sur l'Australie - en témoignent les pluies diluviennes qui ont inondé, en décembre 2010, la région australienne du Queensland. L'Afrique australe et le Brésil sont, de même, généralement soumis à de plus fortes précipitations lorsque La Niña s'est installée dans le Pacifique.
Au cours des mois d'hiver, le phénomène rend également plus probables les épisodes de fortes précipitations neigeuses sur le nord-est des Etats-Unis.
Mais, à plus brève échéance, le retour de La Niña pourrait aussi renforcer les cyclones du bassin Atlantique. "La saison cyclonique (qui dure de juin à novembre) en cours a atteint son pic fin août et elle devrait déjà compter parmi les plus actives jamais observées, après la saison 2005, rappelle Christophe Cassou, spécialiste de modélisation du climat et chercheur (CNRS) au Centre européen de recherche et de formation avancée en calcul scientifique (Cerfacs). Une nouvelle Niña pourrait venir renforcer encore la fin de cette saison." Celle-ci compte déjà, à mi-parcours, quelque 14 tempêtes tropicales nommées, soit déjà bien plus que la moyenne pour une saison entière, soit entre 10tempêtes et 12 tempêtes.
La Niña ne provoque cependant pas seulement des calamités. Les pêcheurs péruviens et chiliens se réjouissent généralement de la voir survenir : le refroidissement du Pacifique tropical est associé à des eaux plus poissonneuses.
En outre, la présence de cette "anomalie froide" contrecarre l'augmentation tendancielle de la température moyenne terrestre. Les six premiers mois de l'année en cours ne sont ainsi classés, selon le National Climatic Data Center (NCDC) américain, qu'au onzième rang des six premiers mois les plus chauds depuis la fin du XIXe siècle.
L'année 2011 s'annonce donc bien plus fraîche que celle qui l'a précédée, qui pointait à la première place, au coude à coude avec 2005.

Stéphane Foucart  
Article paru dans l'édition du 11.09.11

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